Un article de I. Bom Cabelo (Juvisy), contributeurs Sou Capoeira
S’il y a une chanson qu’on entend à toutes les rodas de capoeira, c’est bien celle-là : « A bananeira caiu ».
En tant que graphiste et capoeiriste, je me suis souvent retrouvé dans cette situation ou mon bananier à moi, il est tombé.
Dans le monde de la capoeira, les évènements sont nombreux, et tous les jours de nouvelles affiches et nouveaux flyers apparaissent, forçant les capo-graphistes comme moi à être le plus créatif possible pour sortir du lot.
Du fait d’un budget souvent serré et de la démocratisation des logiciels d’édition d’image, certains organisateurs réalisent eux-mêmes leurs supports de communication. Cela donne parfois de beaux résultats, mais parfois aussi des choses… venues d’ailleurs.
C’est là où selon moi survient le complexe de la bananeira…
La sensibilité artistique est propre à chacun, et une même œuvre n’aura pas le même impact sur des personnes différentes. Devant la colombe minimaliste de Picasso par exemple, des artistes en herbe pourraient dire : « Moi aussi je peux le faire, ce ne sont que quelques traits noirs ! », tandis que d’autres artistes seraient hypnotisés par la perfection du tracé et se diraient : « Allez ! Je vais essayer encore une fois, et peut-être que cette fois j’aurai le même rendu que Picasso. »
L’organisateur d’un événement de capoeira, ou d’une roda, ou d’un cours, a trois possibilités pour créer ses supports de communication :
- C’est un caméléon touche à tout, il le fait lui-même.
- L’un de ses élèves est capo-graphiste.
- Il fait appel à un graphiste extérieur.
Etant personnellement concerné par le cas numéro 2, c’est là que mon complexe entre en jeu :
– Souci n°1 : le cahier des charges (CDC)
Il est souvent peu détaillé et laisse donc un champ de travail bien
trop vaste au créateur. Exemple : « Euh… je veux une belle créa, avec plein de couleurs et un capoeiriste au milieu. »
– Souci n°2 : le contenu
Les fichiers que l’on doit traiter sont rarement conçus pour un usage optimal. Par exemple, les logos à placer sur les visuels ne sont pas vectorisés (donc difficile de les agrandir, de les coloriser, etc.).
– Souci n°3 : la charte
Une fois la création terminée et chaque détail bien à sa place, on
apprend qu’il faut ajouter au visuel le nom de telle personne, le logo de tel organisme, etc. Il ne reste plus qu’à réorganiser l’ensemble afin que tous les éléments tiennent dans le cadre. Le bonheur…
– Souci n°4 : le nom des participants
Sachant qu’il faut parfois mettre le nom d’un élève, qui est lui-même élève d’un autre élève, qui est lui-même élève d’un instructeur, lui-même affilié à un maître, lui-même affilié à un autre maître… comment fait-on pour placer tous ces noms sur un t-shirt sans en faire un XXXL ?
Souci n°5 : la critique
Après des heures de travail et de recherche, on obtient enfin une
œuvre dans laquelle on a mis toutes nos tripes, toute notre énergie e toute notre créativité. Et là, l’organisateur nous dit : « Non, j’aime pas ». Alors on cherche à comprendre, de savoir ce qui ne va pas, et tout en essayant de rester diplomate, on pose la question : « Qu’est-ce que tu n’aimes pas ? » Et là…
A BANANEIRA CAIU !
Heureusement, le complexe de la bananeira n’est pas systématique, car bien souvent notre sensibilité artistique est proche de celle des gens qui nous entourent. Mais c’est très difficile de mettre sa propre sensibilité artistique de côté et de rendre un travail impersonnel, car ça revient à refreiner sa propre créativité.
De même que le complexe de la bananeira peut être vécu par le capo-graphiste, il peut aussi être subi par le capo-vidéaste, le capo-photographe, etc.
Merci à Cabeça de Ovo pour l’édition!Vous avez aimé cet article? N’hésitez pas à le partager!
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