Voici la suite de notre thématique sur les baptêmes et passages de corde, un rituel qui peut être déconcertant, et qui est très différent selon les groupes! Dans l’épisode 1, on avait Sul da Bahia, Muzenza et CDO Paris.
Et dans l’épisode 2, c’était Malungos, Abadá, et Chapéu de Couro!
Cette fois-ci, découvrez comment ça se passe chez Senzala, Iê Bahia, et Biriba Brasil!
Senzala
Le passage de corde est simple, c’est au mérite. La première année, l’élève est baptisé ; les années suivantes, il change de grade selon son investissement pendant l’année écoulée. On change de corde environ tous les deux ans. La corde d’élève gradé est plus compliquée à obtenir : elle est donnée selon le travail effectué et le rapport que la personne a avec le monde de la capoeira.
Chez Senzala, on ne fait pas passer d’examens mais on évalue la personne en continu. Pour avoir la ceinture de Mestre, il faut aller au Brésil. Le nombre de cordes n’est pas toujours le même, ça dépend du Mestre. On n’a pas besoin de certificat mais plus on fait d’événements, et plus on devient un bon capoeiriste.
- Focus sur « Senzala Maître Elias »
Les débutants jouent avec des maîtres/contremaîtres/professeurs pour leur baptême (la remise de la première corde).
Après, les élèves qui reçoivent une corde jouent avec les autres élèves qui prennent le même grade.
Les élèves, qu’ils prennent un grade ou non, qu’ils soient du groupe ou non, peuvent jouer avec les élèves qui prennent le grade équivalent au leur.
Ceux qui prennent la corde bleue (élève gradé), vont jouer sur les rythmes de Iuna et Angola. Nous n’avons pas vu comment cela se passait pour les niveaux du dessus.
Iê Bahia
Chez Iê Bahia, c’est un peu comme dans la plupart des groupes bahianais. C’est-à-dire que c’est aussi sous forme de « contrôle continu » que le professeur (mestre ou autre) évalue l’élève et son investissement tout au long de l’année.
Pour les plus gradés, cela concerne la globalité de la capoeira, il n’y a pas d’examen mais les attentes ne sont pas les mêmes (en fonction de la graduation ainsi que des capacités d’évolution par la suite : on ne fera pas passer de corde à un élève qui dis qu’il arrête l’année prochaine… pffff pas d’intérêt!
Puis c’est lors de la cérémonie de fin d’année que les élèves obtiennent leurs grades, après avoir démontré leurs aptitudes lors de jeux avec les invités, qui les testent plus ou moins, dans la ronde. Les élèves sont appelés un par un, et c’est sensé être une surprise, par ordre croissant de graduation afin de jouer avec un ou plusieurs invités. L’un d’entre eux remet alors la nouvelle corde.
Donc comme dans la plupart des groupes, les élèves passent une corde chaque année jusqu’à approcher la corde équivalente à celle d’élève gradé , qui constitue déjà la 9ème corde. A partir de là, les choses ralentissent et les attentes sont plus grandes. Chez Iê Bahia, il n’y a pas de moniteur ni d’instructeur mais un grade de « formado » (11è corde), et c’est à partir de là qu’il faut vraiment questionner la place que la capoeira occupe dans sa vie. Il n’existe pas de liste de choses obligatoires pour atteindre une corde… en dehors d’être présent, de jouer des instruments, de chanter, d’aider le groupe, de connaître les fondements de la capoeira, et de pouvoir donner le cours selon le niveau atteint.
Biriba Brasil
Tout d’abord, il est peut-être nécessaire de rappeler que le groupe Biriba Brasil a été fondé par deux contra-mestres (Jorge et Requeijão) du groupe Berimbau de Ouro de Mestre Marreta. Cela s’est fait d’un commun accord avec Mestre Marreta, qui d’ailleurs les a formés Mestres tous deux en 2008. Donc pas de scission dans la douleur mais juste une nouvelle voie, pour différentes raisons, notamment une volonté des deux contra-mestres de l’époque, de modifier un peu le système de graduation.
A l’époque il n’existait que 7 cordes pour arriver à Mestre: verte, verte et jaune, jaune, jaune et bleue (c’était déjà « instrutor »), bleue (professor), bleu-vert-jaune-blanc (Contra- Mestre) et blanche (Mestre). Bien sûr, on ne recevait pas une corde par an!
Requeijao et Jorge ont souhaité rallonger le parcours tout en continuant à motiver l’élève assidu et à lui montrer qu’il progressait, parce qu’il y a des nuances entre chacun de ces niveaux.
Ils ont donc eu l’idée d’introduire une corde intermédiaire entre chaque corde déjà existante. Partant d’une corde artisanale tressée à quatre bruns (par les petites mains des élèves mais aussi des Mestres eux-mêmes – il faut le préciser parce que quel taf mon Dieu!!), le « jaune-vert » par exemple a été divisé en 3, soit:
- 3 brins verts /1 brin jaune
- 2 brins verts/2 brin jaunes
- 1 brin vert/3 brun jaunes
Pour arriver à une corde toute jaune. Puis, on recommence avec du jaune et du bleu jusqu’aux 4 brins bleus qui représentent à présent la corde d’Instrutor. La corde de Professor compte 2 brins bleus/1 vert/1 jaune. Contra-mestre, comme avant, 1 vert/ 1jaune/ 1bleu/ 1blanc. Mestre tout blanc. You see what I mean?
Soit 12 cordes de débutant à Mestre pour Biriba Brasil. Il est difficile de donner une définition exacte de ce que doivent savoir les élèves pour chaque grade, rien n’est écrit. Il existe néanmoins des basiques à suivre.
La corde de verte est une corde de « bienvenue » à celui qui pratique depuis 6 mois minimum et démontre l’envie « d’entrer » dans le groupe. Avec la cérémonie du batizado, les profs et mestres présents le font tomber (avec plus ou moins de délicatesse), histoire de lui signifier « ça y est, tu es entré dans notre monde ».
A partir de là, tout va se jouer au mérite. Si l’élève est assidu, appliqué, progresse en mouvements et en musique, il pourra avoir une corde par an durant les 3 années suivantes pour le motiver. En général, l’élève doit quand même connaître les toutes premières séquences de Bimba.
Par contre, pour accéder à la corde jaune, il y a des notions obligatoires. L’élève doit maîtriser les instruments de musique, savoir chanter en jouant les rythmes basiques, y compris le maculêlê à l’atabaque, savoir chanter au moins une ladainha, connaître quelques mouvements de floreio comme le macaco ou l’au dobrado par exemple.
A partir de cette corde, il n’y a plus de délais, on peut attendre 1, 2, 3 ans ou plus pour obtenir la suivante.
Pour devenir Monitor, il faut être déjà allé au Brésil, et pour être Instrutor, savoir parler le portugais est obligatoire. Comment transmettre et comprendre totalement la capoeira sans en connaître la langue, la culture? Comment ne pas la dénaturer, si on ne comprend même pas ce qui est dit ou insinué dans les chants, si on ne peut échanger avec les différents Mestres et professeurs que l’on croise et qui ne parlent pas notre langue?
Pour passer Professor, il faut être déjà « ancien », je pense ne pas me tromper en indiquant un MINIMUM de 15 ans d’assiduité. Et là, évidemment, la musique doit être parfaitement maîtrisée, ainsi que des connaissances sur la capoeira en général bien sûr (avoir lu, écouté, vu, rencontré).
Les deux Mestres du groupe se tiennent informés de leurs intentions de donner telle ou telle graduation à leurs élèves respectifs, et peuvent échanger des opinions mais chacun décidera pour « les siens » au final.
L’élève n’est pas nécessairement prévenu qu’il changera ou pas de grade (ce qui cause parfois des déceptions il faut l’avouer), il est appelé le cas échéant, au moment même où cela va se passer.
A partir de la 4ème corde, les élèves de même graduation jouent d’abord entre eux avant d’être « achetés » individuellement par des Mestres ou des Professores. Il n’y a que les futurs Instrutores et Professores qui sont prévenus et ont droit à une réunion au préalable, pour bien prendre conscience de la confiance et de la responsabilité qui leur sont données. La « cérémonie » est pour eux plus longue, avec différents jeux, sur les rythmes Angola, São Bento Grande de Angola, Regional et Iuna.
En principe, seuls les profs, contra-mestres et mestres peuvent donner des cordes (pour les changements de grade) et seuls les Mestres peuvent « baptiser ». Pour devenir Mestre (aaaaah, le Saint Graal!!!), il faut un minimum de 25 ans de pratique, 15 ans d’enseignement et de préférence quelques cheveux blancs.
Mais avant tout, et ceci s’accentuant de grade en grade, Mestre Requeijao dit que le plus important n’est pas d’être reconnu dans son groupe, mais reconnu par la « communauté capoeira », par les autres élèves, professeurs, Mestres, ceux qui nous découvrent, ceux qui nous connaissent depuis longtemps et ceux que nous rencontrerons. On ne peut devenir un grand capoeiriste en restant dans son coin…
A bientôt pour Grupo Capoeira Brasil, Célero de Bamba et Vamos Capoeira Senzala!
Vous avez aimé cet article? N’hésitez pas à le partager! N’oubliez pas de liker SouCapoeira sur facebook et de nous suivre sur twitter!