Un article de Maritaca. Nouvelle contributrice SOUCAPOEIRA!
J’ai passé en Syrie l’une des périodes les plus heureuses de ma vie, faite de cours d’Arabe à l’Université de Damas, longues conversations autour d’un thé dans le souk et découverte de la capoeira : à l’époque notre groupe était très actif dans le social et nous organisions des entraînements gratuits pour les enfants des communautés de réfugiés palestiniens et irakiens.
Aujourd’hui, ce groupe n’existe plus, nous sommes tous répartis dans le monde, mais les réseaux sociaux nous permettent toujours de rester en contact ; c’est justement sur un réseau social qu’il y a quelques semaines j’ai reçu un message de l’un de mes amis syriens qui me demande si je connais une entreprise qui peut expédier des berimbaus et un atabaque à Damas, ou au pire à Beyrouth. Malheureusement je n’ai pas pu l’aider, mais il avait un contact qui semblait fiable, donc il y a quelques jours je lui ai écrit à nouveau pour savoir s’il avait réussi à obtenir ses instruments. Sa réponse était : « Non, j’ai avorté la mission, ils sont tous partis ». Guerrero, c’est son apelido, est apparemment le dernier capoeiriste qui reste à Damas. Je crois que ce serait intéressant de partager une partie de son histoire avec les lecteurs de SouCapoeira. Voici une courte entrevue.
T’es originaire d’où ? Tu vis où à présent et combien de temps as-tu vécu là?
Je suis originaire de Damas, en Syrie. Je vis à Damas et j’ai vécu ici la plupart de ma vie depuis que je suis né en 1980.
Quel est ton travail?
Je suis médecin.
Où as-tu commencé la capoeira et pourquoi?
J’ai commencé il y a 10 ans quand j’étais en Master au Japon, à l’âge de 25 ans. Le jour où je suis arrivé au dortoir, il y avait un Espagnol dans l’arrière-cour qui s’entrainait dans ce sport que je ne connaissais qu’à travers les jeux vidéos, mais que j’espérais pouvoir apprendre un jour parce que je suis passionné de sport, arts martiaux en particulier. J’ai tout de suite commencé à parler avec ce garçon et je lui ai montré les coups de pieds de base que j’avais appris au taekwondo ; de son coté, il m’a expliqué des choses à propos de la capoeira et il m’a montré quelques mouvements. Il m’a après invité à rejoindre les classes régulières de son groupe et, bien sûr, je l’ai fait immédiatement.
Qui t’a donné ton apelido?
Au fait j’en ai deux : Guerrero et Boa Terra. Le premier m’a été donné à Chiba, au Japon, pendant mon Batizado avec mon premier groupe, Expressão & Arte. Le deuxième vient de Mestre Ryck, rencontré à Bahia. Normalement j’utilise Guerrero, même si je ne me vois pas comme un guerrier !
Donc t’as été au Brésil ?
Oui, je suis allé au Brésil en 2011 et je me suis rendu à Bahia. Je suis tellement content d’avoir fait ce voyage !
Est-ce que tu continues à pratiquer la capoeira?
Je pratique la capoeira depuis maintenant 10 ans, mais dans les trois dernières années je ne me suis pas entraîné régulièrement. Aujourd’hui, à cause de la crise en Syrie, tous mes amis capoeiristes ont quitté le pays, donc je peux juste essayer de pratiquer tout seul de temps en temps, mais ce n’est pas la même chose qu’avant, la bonne énergie est perdue.
Qui est le professeur ou maître qui a eu plus d’impact sur toi ?
Sans aucun doute Professor Neguinho du groupe Capoeira Marana au Japon. C’est le professeur avec qui je me suis entraîné le plus longtemps, il m’a énormément influencé.
Est-ce que tu peux partager avec nous ton meilleur souvenir concernant la capoeira et le pire?
Mon meilleur souvenir remonte à la période juste après l’explosion de la crise en Syrie, quand tous nos professeurs sont partis et mes amis et moi avons lutté ensemble pour continuer les entraînements ; nous donnions les cours et gardions le feu allumé. Nous avons réussi à créer un nouvel élan et j’ai commencé à avoir mes propres élèves. C’était une sensation incroyable, on était une famille. Le pire arrive maintenant, quand parfois je deviens nostalgique, donc je prends le dernier berimbau qui me reste, avec sa cabaça cassée, et je réalise que je ne peux pas retrouver le même sentiment qu’avant. Je le pose et je me sens frustré.
Comment te vois-tu d’ici un an ?
Je suis plutôt inquiet à propos de la situation actuelle, cependant j’espère pouvoir voyager, mais je n’ai pas encore de projet concret.
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